A Genève, compte tenu des énormes différences de taille et de richesse entre les communes, les impôts municipaux sont prélevés en large partie sur le lieu de travail et dans une moindre mesure sur le lieu de domicile des contribuables. Or, l’initiative « j’y vis j’y paie » propose un renversement complet de la fiscalité communale, qui s’illustre à travers un exemple simple. Imaginons une personne qui habite à Cologny et travaille toute la journée en Ville de Genève, profitant des infrastructures et services publics urbains (routes, transports publics, police municipale, etc.). À midi, elle profite d’une pause bien méritée pour faire des longueurs dans une piscine publique, ou un jogging dans un parc bien entretenu par les employé-es de la commune. Après le travail, elle se détend dans un lieu de culture subventionné par la ville. Le week-end, hiver comme été, elle se trouve rarement à Cologny et préfère profiter de prendre un peu de hauteur dans son chalet.
Dans la situation actuelle, cette personne paie une majorité de ses impôts en Ville de Genève (lieu de travail) et une minorité à Cologny (domicile). Cela s’explique par le fait que les communes qui concentrent les places de travail sont aussi celles qui offrent le plus de prestations à leur population, y compris aux habitant-es des communes environnantes. C’est aussi une mesure de justice fiscale élémentaire puisque les communes urbaines font face à des difficultés considérablement plus élevées qu’en périphérie, notamment en termes de précarité, d’aménagement du territoire, ou encore de défis écologiques.
L’IN187 propose que l’imposition soit perçue sur le seul lieu de domicile, sans rééquilibrage des recettes entre les communes. Dans cette configuration, laVille de Genève perdrait 48 millions de francs et Cologny gagnerait 5 millions. Lancy, Vernier et Meyrin perdraient respectivement 11, 6 et 5 millions ; Chêne-Bougeries gagnerait presque 10 millions. Un large comité, réuni au sein de la Plateforme justice fiscale, lance donc la campagne contre cette initiative dangereuse. Comme dans le cas de l’impôt auto, cette initiative extrême de l’UDC a incité la majorité à ficeler un contreprojet qui prévoit lui aussi de fixer le principe de l’imposition sur le lieu de domicile. Celui-ci propose une refonte de la péréquation à l’horizon 2029, aux contours extrêmement flous, qui ouvrirait une période d’instabilité dans les relations entre communes, pour aboutir à un résultat au mieux équivalent et au pire bien plus inégalitaire que la situation actuelle.
« J’y vis, j’y paie » représente un jackpot fiscal au profit des riches communes suburbaines. Elle permettrait à des communes gouvernées à droite de baisser encore leurs centimes additionnels, tandis que les grandes villes auraient le choix entre augmenter leurs impôts et baisser leurs prestations. La droite, non contente de prendre dans la poche des couches populaires urbaines pour financer le train de vie des couches aisées de la périphérie, pourrait ainsi continuer à présenter les grandes villes genevoises comme des enfers fiscaux.
Contacts :
- Jean-Luc Ferrière, Syndicat SIT
- Sylvain Thévoz, PS
- Bernard Clerc, SolidaritéS
- Julien Nicolet-dit-Félix, Les Vert-e-s
- Tobia Schnebli, Parti du Travail – Ensemble à gauche