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Pourquoi refuser l’initiative « anti-burqa » ?

François Mireval
Enseignant (collège, ECG, ECGA)

Le 7 mars, on vote sur l’initiative dite « Oui à l’interdiction de se dissimuler le visage ». Ce texte UDC s’attaque à l’autonomie cantonale, aux choix des femmes, et se nourrit de poncifs.

Ce texte est problématique pour de nombreuses raisons. Premièrement, la Constitution n’a pas à abriter des règles vestimentaires. Ensuite, le code pénal prévoit déjà de punir la contrainte, ce qui rend l’alinéa n°2 du texte parfaitement inutile.

Plus ennuyeux : l’ordre public dépend des cantons, souverains dans ce cas. Ainsi le Tessin et Saint-Gall ont voté oui à des textes similaires. Maigres résultats : quelques amendes à des femmes en burqa et à des hooligans près d’un stade. Quatre autres cantons ont dit non, dont la Landsgemeinde de Glaris. Quel bailli lui expliquera qu’il peut piétiner son choix démocratique ? Piquant : l’UDC adopte ici le procédé qu’elle reproche à l’Europe de tenir envers la Suisse !

Plus grave : cette initiative part du principe que les femmes qui portent le voile sont des victimes et qu’elles agissent sous la contrainte d’un père ou d’un mari autoritaire.

Rappelons encore que peu de femmes portent le niqab en Suisse, une trentaine tout au plus. Comme l’a révélé une étude d’Agnès de Féo publiée chez Armand Colin, la majorité des femmes portant le niqab ici ne le font pas sous la contrainte, car elles sont indépendantes. Il s’agit souvent d’un choix assumé quitte à affronter l’hostilité de la rue, voire de leur famille.

Les auteurs rêvent de voir le genre féminin sous le règne du KKK (Kinder, Kirche, Küche). Accepter l’initiative, c’est soutenir cette régression.

Le Parlement propose un contre-projet. Le devoir de montrer son visage à l’autorité s’y trouve. Surtout : différentes lois (sur l’égalité : sur la coopération et le développement ; sur les étrangers et l’intégration) accueillent des articles améliorant concrètement la situation des femmes. Bien sûr les initiants ont refusé de retirer leur texte, révélant ainsi leur mépris de la moitié de la population.

À souligner : ce contre-projet est indirect, donc non soumis au vote. Il n’est adopté qu’en cas de refus de l’initiative : votons NON !

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