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Heures d’ouverture des magasins : non à un retour vers le passé !

François Mireval,
Membre du Comité directeur, en charge de la formation interne


« La droite genevoise contre-attaque ! » Le personnel de vente est dans sa ligne de mire ! Ce n’est hélas pas le titre du prochain péplum à voir dans une salle de cinéma, mais un sérieux sujet de société sur lequel nous nous prononcerons le 28 novembre prochain. Il s’agit de la dernière mouture de la loi sur les heures d’ouverture des magasins (LHOM) vigoureusement combattue par le PS et tous les partis et syndicats de gauche. Ce mauvais scénario, encore inachevé, avait pourtant bien commencé. En 2016, la population genevoise  acceptait certes le principe d’une dérogation permettant l’ouverture dominicale des commerces trois fois par an (ainsi que le 31 décembre, férié à Genève), mais cette autorisation était assortie d’une condition impérative : l’existence d’une convention collective de travail (CCT) pour le personnel de vente. Cette CCT garantirait des conditions de travail décentes impliquant notamment des horaires négociés et un salaire minimum. (Le vote cantonal sur ce dernier point n’avait pas encore eu lieu). Un nouvel espoir semblait possible.

Depuis ce résultat apparemment prometteur, les mois ont passé, mais la CCT est restée en rade. Une certitude s’impose : le patronat n’en veut pas, malgré la volonté populaire clairement exprimée dans les urnes. Ses relais politiques de droite au Grand Conseil ont pris le relais et nous proposent maintenant, outre une prolongation de l’ouverture du samedi à 19h, de supprimer l’obligation d’une CCT : une sorte de retour au côté obscur de la loi qu’il faudra impérativement refuser avec énergie.

Quelques réalités simples doivent être rappelées ici, toutes appelant à voter non à cette LHOM régressive. Plus de 60 % du personnel de vente est composé de femmes, avec une importante proportion de travailleuses à temps partiel en raison des nécessités familiales. Plus d’heures d’ouverture signifie pour elles des horaires encore plus morcelés sans réelle possibilité de les refuser. Leur vie familiale en souffrira grandement, notamment en décembre, principal mois d’achat. Par ailleurs, la légendaire création d’emplois est un mensonge souvent répété, jamais étayé. Une employée de la grande distribution a même été récemment licenciée après s’être référée à la minuscule CCT pourtant signée par son employeur. Ces grandes surfaces tireront quelques petits profits d’une acceptation de cette loi, mais pas les petits commerces, qui ne disposent pas du personnel nécessaire pour rester ouverts si longtemps.

C’est bien sûr le contenu du porte-monnaie qui incite la clientèle à venir dépenser dans les boutiques. Quand des achats se font en France voisine, c’est avant tout en raison des prix plus bas, et non des horaires étendus. Le patronat pourrait aisément vérifier l’impact sur son chiffre d’affaires d’une augmentation des salaires, s’il était seulement prêt à tenter l’expérience…

Avec le PS et les forces de gauche, disons NON à cette LHOM inique !

 

Des ouvertures au détriment du personnel

Hélène* a 54 ans et est caissière pour une grande enseigne depuis 19 ans. Elle a commencé ce métier en répondant à une annonce à l’ouverture d’une succursale. A l’époque mère au foyer, elle cherchait un complément et l’annonce proposait aux employé-es de pouvoir choisir leurs jours de travail. Une flexibilité qui semblait attrayante au départ mais qui ne l’est plus
aujourd’hui.

Postscriptum : Si la modification est acceptée, quel impact cela aura sur votre vie ?

Hélène : Cela rendra le travail encore plus pénible. Les nocturnes ne fonctionnent pas mais les samedis sont déjà surchargés. Ce n’est pas « juste » une heure en plus, c’est parfois la 50e de la semaine, c’est la plus fatigante, celle où durant chaque 60 secondes de chaque 60 minutes nous faisons 10 choses en même temps. Pour les dimanches de décembre c’est la même chose. Décembre est le mois de la famille, avec cette modification cela le sera encore moins pour nous.

PS : Avez-vous déjà subi des pressions pour accepter des horaires qui ne vous convenaient pas ?

H : Sans parler de réelle pression nous sommes toujours en sous-effectifs et il faut déjà s’adapter constamment. Nous recevons notre planning deux semaines à l’avance mais cette semaine mon gérant m’a informée mercredi que je serai en congé jeudi, cela aurait très bien pu être l’inverse et cela se produit très souvent. Pour prendre un rendez-vous ou profiter de notre famille c’est compliqué.

PS : Que voudriez-vous dire aux Genevois-es pour les convaincre de voter non ?

H : Si les gens n’ont rien d’autre à faire que d’amener leurs enfants dans les centres commerciaux le dimanche je plains leur enfant ! Les gens qui vont en France faire leurs courses n’y vont pas pour des questions d’horaires, cet argument ne tient pas. Nous sommes déjà en sous-effectif, si les entreprises voulaient créer des emplois elles auraient déjà pu le faire. Pour un petit avantage pour certain-es, il y aura de lourdes conséquences pour les vendeur-euses et leur vie de famille.

PS : Vous avez décidé de témoigner anonymement, pouvez-vous nous dire pourquoi ?

H : J’ai 54 ans et je ne peux pas me permettre de perdre mon emploi. J’aime aussi mon métier et mes client-es, c’est donc aussi par respect envers eux. Je pense que l’important n’est pas de savoir qui est la personne qui parle mais ce qu’elle a à dire.

Propos recueillis par Clémence Peillex

*Prénom d’emprunt

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