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Frontex: la honte de l’Europe

Jean Ziegler

Frontex est l’agence de garde-frontières et de garde-côtes de l’Union européenne. Elle a été fondée en 2005 avec siège à Varsovie. Ses bateaux d’interception rapides, armés de mitrailleuses lourdes, ses avions, ses drones et son équipement technologique sophistiqué (radars, détecteurs laser, etc.) constituent le bras armé d’une stratégie criminelle ; celle qui est mise en œuvre par la Commission européenne pour empêcher le plus grand nombre possible de réfugiés d’atteindre notre continent et d’y déposer une demande d’asile.

Le droit d’asile, défini par l’article 14 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU, est un droit humain universel et une conquête de civilisation. Quiconque est persécuté, torturé, bombardé dans son pays, pour des raisons politiques, ethniques ou religieuses a le droit de traverser une frontière et de demander aide et protection dans un pays étranger. Pour un-e réfugié-e de la violence, il n’existe pas de passage illégal de frontière.

Dans la Méditerranée centrale, dans la mer Egée, Frontex pratique la chasse aux réfugié-es. Ses bateaux interceptent en haute mer, souvent avec une extrême brutalité, les zodiacs et autres embarcations fragiles, remplis de familles angoissées, et les forcent à retourner dans les eaux territoriales turques ou libyennes. Lors de ces push backs, les naufrages meurtriers sont fréquents.

Frontex soutient, sur terre et dans les airs, les garde-frontières hongrois, polonais, grecs, croates, etc., les finance et les arme.

Sur les frontières sud et est de la forteresse Europe se commettent ainsi d’effroyables crimes contre l’humanité. Exemple : des garde-frontières croates arrachent les ongles des réfugiés – aussi d’enfants ; avec le soutien de policiers de Frontex, en Bosnie-Herzégovine, en Hongrie, en Tchéquie, des garde-frontières battent et pillent les réfugié-es et les refoulent.

La Suisse est membre de Frontex depuis 2009. Des douaniers, des policiers suisses sont présents sur ses navires de guerre et participent à ses interventions d’interception et de refoulement. En empêchant les persécutés de pourvoir déposer une demande de protection sur sol européen, des fonctionnaires suisses collaborent activement à la liquidation du droit d’asile.

Lors de leur session d’automne 2021, les Chambres fédérales ont décidé d’augmenter massivement, dès l’année prochaine, la contribution suisse à Frontex, soit de 14 millions de CHF annuels actuellement à 61 millions annuel. Au Conseil national le vote a été serré : 88 voix pour l’augmentation contre 80 voix contre (essentiellement Socialistes et Vert.e.s) et 28 abstentions.

Contre l’arrêté fédéral du 1er octobre 2021 portant approbation et mise en œuvre de cet engagement vis-à-vis de l’Union européenne, une coalition d’organisations d’aide aux réfugié-es a lancé le « Référendum non au financement de l’agence de garde-frontières Frontex ». Le Parti socialiste, les Vert-e.s, le Parti du travail, les syndicats soutiennent la démarche.

Le temps presse : nous devons réunir les 50 000 signatures indispensables jusqu’en janvier 2022.
Collecter les signatures, voter pour l’annulation de cet arrêté ignominieux sont une exigence de raison et de justice.

Mais même si nous réussissons à corriger l’indécente décision du Parlement, le combat ne sera pas terminé pour autant : la Suisse doit sortir de Frontex. Nos impôts ne doivent pas servir à financer une stratégie de terreur, de refoulement et de destruction du droit d’asile, qui insulte la tradition humanitaire de notre peuple.

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