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Seul un oui est un oui!

Laurence Fehlmann Rielle et Christian Dandrès
Conseillère nationale — Conseiller national

Le Conseil national a vécu un moment historique hier. Il a accepté à une courte majorité de modifier la partie du Code pénal consacrée aux infractions sexuelles et d’introduire le principe selon lequel il n’y a pas de relation sexuelle admissible sans consentement (seul un oui est un oui).

Ce débat est le fruit de quinze ans de mobilisation. De #MeToo à la Grève des femmes, un mouvement s’est constitué pour refuser la domination et le patriarcat. Il est, avec la grève du climat, un des faits politique et social les plus marquants de ces dernières années en Suisse. Ce mouvement a soulevé une large lame de fond contre l’oppression et l’exploitation. Il est une réponse partielle mais sérieuse contre les politiques néolibérales qui remettent en cause les quelques avancées sociales obtenues en faveur des salariées en Suisse.

Il y a quelques années encore, la conscience de la nécessité de réformer le droit pénal en matière sexuelle était quasi inexistante auprès du grand public. Aujourd’hui, le Conseil national reconnaît que tout acte sexuel grave sans consentement doit pouvoir être reconnu comme un viol, et ce indépendamment du sexe de la personne concernée.

En Suisse, l’une des étapes importantes de la mobilisation a été la grève des femmes de juin 2019 qui a permis notamment que le débat au Conseil national aboutisse à ce changement de paradigme. Les femmes socialistes se sont aussi massivement mobilisées. Si le Conseil des Etats suivait le Conseil national, le corps de la femme ne serait plus juridiquement conçu comme un objet à la libre disposition du désir de l’homme.

Répondre au néolibéralisme, tel est bien l’enjeu. Un des actes à l’origine de #MeToo a été l’agression d’une femme de chambre d’un hôtel par le directeur du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn. Une femme noire et sans formation, agressée par l’élite financière mondiale. C’est tout un symbole.

Les opposant-es – dont Vincent Maître – ont prétendu à tort que cette modification du Code pénal instaurait une sorte de présomption et renverserait tous les principes en matière d’instruction pénale. Il n’en est rien. Le procureur et la police devront toujours enquêter sur le viol et tenter d’établir la vérité. Le principe de la présomption d’innocence demeure malgré ce changement.

Lutter contre l’oppression des femmes et pour l’égalité est une étape décisive contre l’exploitation de manière générale, pour autant que l’on refuse son instrumentalisation.

Durant la campagne en vue de la votation du 25 septembre 2022 sur AVS-21, des voix bourgeoises ou « sociales-libérales » ont plaidé en faveur d’une égalité formelle (une retraite ordinaire à 65 ans pour les hommes et pour les femmes), ce qui est en réalité une discrimination faite aux femmes qui ont des salaires inférieurs à ceux des hommes.

Pire encore, certain-es se sont mobilisé-es pour libérer manu militari des femmes qu’ils et elles considéraient comme incarcérées dans une idéologie religieuse. Nos féministes d’Egerkingen considèrent qu’il est impératif d’arracher le voile à des musulmanes dans la rue, pour les libérer d’une prescription vestimentaire, tout en exigeant leur renvoi vers les seigneurs de guerre libyens. L’hypocrisie de ces gens n’a pas de limite.

Le mouvement #MeToo et la Grève des femmes doivent continuer à servir de moteur à la mobilisation contre les politiques économiques que les patrons et les actionnaires préparent pour renforcer leurs profits en cette période de crise sociale. Préparer la prochaine grève des femmes, en juin 2023, sera l’une de nos priorités. Le traitement réservé aux femmes est celui que le système économique tente d’imposer aux migrant-es, aux travailleurs et travailleuses précaires et à toutes les personnes qui ne possèdent rien ou que leur force de travail.

Thématiques associées: Droits fondamentaux