Profitant d’un retournement de veste du MCG, la droite bourgeoise (UDC-PLR-Centre), inféodée au lobby immobilier, a voté aujourd’hui une loi scandaleuse qui foule au pied la loi PAV votée par près de 65% de la population genevoise en 2018. Le texte voté livre sur un plateau des terrains publics aux appétits voraces de spéculateurs et par là même prétérite gravement la réalisation du droit au logement, déjà si lointaine à Genève. Les Socialistes et les Vert-e-s ne laisseront pas faire et contesteront par référendum cette attaque en règle contre les biens et les intérêts de la collectivité.
On n’aurait pu imaginer signal plus clair pour le coup d’envoi de cette nouvelle législature. Réuni en plénière pour sa première session de travail, le Grand Conseil, dans sa nouvelle composition très à droite sortie des urnes le 2 avril dernier, vient de valider en 3e débat le vote d’un projet de loi du PLR qui s’en prend directement et frontalement aux terrains publics situés sur le périmètre du PAV.
En totale violation de l’accord qui avait été négocié avec les partenaires, notamment les représentant-es des locataires (Asloca), la droite majoritaire passe ainsi en force et ouvre grand la voie à la spéculation sur des terrains appartenant à la collectivité – s’asseyant au passage sans vergogne sur une décision populaire.
Un accord à défendre
Pour mémoire, le 23 février 2018, le Grand Conseil votait le PL 12052, fruit de longues discussions et d’intenses négociations menées par les différents partenaires impliqués dans la réalisation du PAV.
L’accord trouvé permettait de renforcer la mixité sociale dans les futurs quartiers et d’augmenter la proportion de logements. Preuve de son caractère équilibré, ce compromis avait été largement soutenu – par les Conseils municipaux des Villes de Genève, Carouge et Lancy, mais aussi par des associations de propriétaires telle que Pic-Vert. Surtout, il avait été approuvé par une large majorité des votant-es (61,44%) le 10 juin 2018, consolidant encore sa légitimité.
Mais tout cela, la droite n’en a cure. Elle a choisi aujourd’hui de faire voler en éclat cet accord, par un vote qui – en fixant à 24% la part minimale de logements PPE en pleine propriété sur les parcelles publiques situées en zone de développement (ZD) – revient de facto à contraindre l’Etat de céder une partie de ses terrains à des privés, et cela à des conditions défiant toute concurrence.
Autant de terrains publics qui seront soutirés à la construction de logement à loyers abordables et également aux coopératives d’habitation et aux fondations immobilières de droit public.
Un détournement de la richesse publique…
En plus d’apparaître contraire au droit constitutionnel et incompatible avec les objectifs d’une politique sociale du logement (seule la PPE en droits de superficie (DDP) permettant de contenir les mécanismes de spéculation foncière et immobilière), la loi votée promet également des pertes financières considérables pour la collectivité.
En effet, elle fixe arbitrairement la rente annuelle des logements PPE en DDP à un niveau près de 3 fois inférieur au prix du marché ! A cela s’ajoute encore une indemnité au terme du contrat de DDP fixée à la valeur vénale du logement en pleine propriété, ce qui revient à une aliénation indirecte du foncier public.
La valeur des parcelles concernées en sera fortement affectée (une moins-value d’environ 20 millions) et il en résultera un manque à gagner considérable pour la Fondation PAV. Au total, selon les estimations, les rentes prévues pour le logement sur les parcelles en mains publiques pourraient diminuer de 4,6 millions de francs par an (-19%).
…Au bénéfice des plus riches
La PPE en droits de superficie est pourtant 15 à 20% moins chère en moyenne que la PPE en pleine propriété. Favoriser la seconde au détriment de la première revient donc à rendre encore plus difficile l’accès à la propriété, dans un canton qui compte déjà près de 80% de locataires.
En 2019, selon l’OCSTAT, 60% de la population genevoise disposait d’une fortune brute inférieure à 100’000 francs et près d’un tiers (26,8%) des résident-es ne disposaient d’aucune fortune du tout. Or le prix médian d’un appartement en PPE était en 2021 de 9’541 francs/m2 – soit plus de 550’000 francs pour un 60m2 et près d’un million pour 100m2. Et après les 10 ans de contrôle des prix, ces mêmes appartements se retrouvent sur le marché spéculatif et se revendent parfois au double du prix.
Par leur vote ce soir, les partis de droite font donc une nouvelle fois l’éclatante démonstration du fait qu’ils ne défendent pas les intérêts des Genevoises et Genevois les plus modestes, ni même ceux de la « classe moyenne », mais bien ceux d’une petite caste de privilégié-es, qui se nourrit de rentes directement ponctionnées sur le dos de la majorité de la population.
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Le réaménagement du PAV est le projet le plus ambitieux en matière de création de logements à Genève pour les prochaines décennies. Il doit permettre d’offrir enfin à la population les logements de qualité, à des loyers abordables, dont elle a tant besoin. Le projet inclut également un grand parc et la remise à ciel ouvert de la Drize, une nature en ville à laquelle la population aspire.
Le vote de ce soir ne fera que ralentir le développement du PAV qui requiert une stabilité des règles du jeu pour le développement des projets.
Les Socialistes et les Vert-e-s ne laisseront pas la droite compromettre ce projet en pillant au passage les caisses publiques. Ils et elles appellent toutes les forces progressistes à s’unir en vue d’un référendum contre cette loi scandaleuse.
Pour plus d’informations:
- Nicole Valiquer Grecuccio, rapporteure de minorité, députée suppléante PS
- David Martin, rapporteur de minorité, député Les Vert-es
- Matthieu Jotterand, membre de la commission de l’aménagement, député PS
- Dilara Bayrak, membre de la commission de l’aménagement, députée Les Vert-es
- Caroline Marti, députée, cheffe du groupe socialiste
- Marjorie de Chastonay, députée, cheffe du groupe Les Vert-es