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Motion Ettlin : les patrons veulent imposer la loi du dumping sur tout le territoire

Le 14 décembre, le Conseil national a adopté la motion Ettlin : « Protéger le partenariat social contre les ingérences discutables ». Quelles sont ces ingérences discutables ? Pour le Conseiller aux États du « Centre », il s’agit des salaires minimaux de Genève et de Neuchâtel. Ettlin veut qu’ils soient écrasés par les salaires inférieurs prévus par des CCT de force obligatoire. Certaines d’entre elles (hôtellerie, restauration, coiffure, nettoyage ou blanchisserie) prévoient en effet des salaires plus bas.

Cette motion est une œuvre de commande d’une Sainte Alliance emmenée par Gastrosuisse qui a pris la tête de 27 organisations patronales et qui poursuivent une guérilla de plus de dix ans contre les salaires minimaux. Toutes les voies politiques cantonales et judiciaires ont été utilisées. Ettlin justifie sa motion par un arrêt du Tribunal fédéral qui mettait définitivement un terme aux procédures menées contre le salaire minimum neuchâtelois. Les recourant-es avaient auparavant combattu cette mesure en votation populaire puis lors des travaux de mise en œuvre au Grand Conseil. Les mêmes ont inspiré à Ettlin sa motion et pesé sur les parlementaires fédéraux. Ils et elles avaient déjà tenté le coup de force avec une motion au contenu pire (18.3934) et au titre plus mensonger encore (« Renforcer le partenariat social »), mais sans succès en 2019.

Ce geste politique intervient alors que le contexte social se dégrade. Si le chômage augmente, ces patrons pourront mettre sous pression les travailleur-euses les plus exposé-es à la concurrence et leur imposer des salaires insuffisants pour vivre dignement en Suisse.

Les jeux ne sont cependant pas encore faits. La motion « Ettlin » a été adoptée à 2 voix près (95/93). Celles des quatre élu-es genevois-es de droite au Conseil national – sauf M. Matter qui a voté contre – auraient suffi pour rejeter la motion. Avec un si faible écart, il reste possible de gagner la partie au Parlement. La motion n’est pas encore une loi. Elle charge le Conseil fédéral de préparer un projet d’acte législatif qui devra à nouveau être discuté par les Chambres fédérales. Une autre majorité pourrait cette fois refuser le projet. Cela dépendra de la capacité à mobiliser les élu-es en particulier de Genève et surtout à maintenir ou renforcer la présence de la gauche au Parlement fédéral. Ce débat n’aura en effet sans doute pas lieu durant cette législature.

Christian Dandrès
Conseiller national — Juriste à l'ASLOCA, avocat

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