Alors que les scandales se succèdent au Département fédéral de la défense, aucune remise en question des priorités en matière de sécurité ne semble à l’ordre du jour. Au parlement, le mot d’ordre reste identique : plus d’argent pour l’armée. Une absence de vision et d’introspection qui se retrouve aussi dans les attaques contre le service civil que le Conseil fédéral veut démanteler au profit de l’armée.
Les civilistes doivent déjà accomplir 1,5 fois le nombre de jours de service qu’ils auraient dû effectuer dans l’armée. Ceci car la voie civile est vue comme plus facile et n’est toujours pas considérée à sa juste valeur. Le Conseil fédéral voudrait en plus fixer un plancher afin que tous les civilistes servent au moins 150 jours quel que soit le nombre de jours d’armée qu’il leur resterait. Il veut aussi augmenter le nombre de jours que devraient effectuer les (sous-)officiers de l’armée qui changeraient de voie. Au total, six mesures dissuasives visent à « réduire l’attractivité » du service civil, les mêmes mesures refusées par les Chambres en 2020.
En 2024, 6799 personnes ont été admises au service civil, ce qui montre que de nombreux jeunes obligés de faire l’armée ne peuvent pas la concilier avec leur conscience et cherchent à accomplir un autre service porteur de plus de sens à leurs yeux. Au lieu de considérer cet engagement et de reconnaître son apport à la population, le Conseil fédéral méprise encore une fois les civilistes, estimant que « [le] nombre important d’admissions […] est problématique ». Le but de sa modification de loi est ainsi de réduire les admissions à 4000 par année, soit près de 41 % de réduction ! Comme il le reconnaît lui-même, il y aurait alors moins de personnes disponibles pour des interventions en faveur de la collectivité, ce qui serait un réel problème pour de nombreux établissements d’affectation tels les hôpitaux ou les crèches par exemple. Mais qu’importe aux yeux du gouvernement qui considère ceci « acceptable, compte tenu de la nécessité de faire respecter la disposition constitutionnelle selon laquelle il n’existe pas de liberté de choix entre le service militaire et le service civil ». Autrement dit : faire respecter l’absence de liberté est plus important que de s’occuper des malades dans les hôpitaux… De la pure idéologie militariste sans aucune considération, ni pour les gens qui accomplissent un service civil, ni pour celles et ceux qui en bénéficient.
Selon la loi, le service civil intervient « dans les domaines où les ressources ne sont pas suffisantes ou sont absentes, pour remplir des tâches importantes de la communauté ». Reconnaître l’importance de ces tâches sans leur allouer les moyens nécessaires revient à laisser tomber celles et ceux qui en ont besoin. Que ce soient nos proches soigné-es dans les hôpitaux, nos enfants dans les écoles, nos paysan-nes dans les alpages, nos grands-parents dans les EMS, chacune et chacun de nous bénéficie de ce service à la collectivité. Mettre à mal le service civil c’est mettre à mal la cohésion sociale de notre pays.