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Conseil fédéral : derrière la pantalonnade, le glissement à droite

Carlo Sommaruga
Conseiller aux Etats — Avocat, Président ASLOCA Suissse, Président Solidar Suisse

La démission soudaine le 15 janvier dernier de la Conseillère fédérale Viola Amherd a ouvert le rituel ballet politique des potentiel-les  candidat-es à sa succession. Comme d’habitude, les médias ont donné le rythme à cette valse et se sont mis à spéculer sur les ambitions personnelles des un-es et des autres à accéder aux plus hautes fonctions exécutives du pays et sur leurs capacités de décision et de conduites de l’administration. Rapidement, le Centre nous a présenté une invraisemblable pantalonnade au cours de laquelle tous les papables, pour reprendre une référence chère au Centre, suivant la dérobade de leur président, se sont l’un-e après l’autre défaussé-es. L’un de ceux-ci réussissant même un culte dominical à sa propre personne en attirant tous les journalistes pour annoncer urbi et orbi qu’il ne serait pas candidat. Pire encore, on a entendu certain-es élu-es, sans les compétences requises pour devenir ministre, gindre de ne pas avoir été contacté-es par le parti, sans pour autant se porter candidat-es. Et oh providence, la candidature tombée du ciel in extremis avant la fin du délai d’un Conseiller d’Etat, inconnu, mais comme par miracle originaire du même canton que le président centriste démissionnaire. Le prochain conclave parlementaire du Centre n’aura d’autre choix que de proposer à l’Assemblée fédérale les deux candidats en lice. Car la présentation d’un ticket à deux est devenue une exigence politique pour éviter les surprises au moment de l’élection. En résumé, un spectacle politique d’un effarant ridicule, pour un parti qui affiche l’ambition d’occuper deux sièges au Conseil fédéral.

Mais le plus préoccupant dans ce renouvellement partiel du Conseil fédéral, c’est le glissement supplémentaire à droite qui se dessine. En effet, malgré toutes les critiques que l’on peut adresser à la Conseillère fédérale démissionnaire, notamment quant à sa volonté d’augmenter le budget de l’armée, au choix d’armements prestigieux aux coûts pharaoniques et inutiles à la défense réelle du pays, à la gabegie financière dans son département ou au rapprochement avec l’OTAN, Viola Amherd a souvent pu joindre sa voix à celles des socialistes lors des débats au Conseil fédéral, notamment sur les questions sociales ou les enjeux européens. Ce ne sera certainement plus le cas avec les candidats centristes actuels. Président des paysans, issu d’une église évangélique sectaire, votant l’arrêt immédiat du financement de l’UNRWA, appuyant systématiquement les coupes financières dans la coopération internationale et soutenant l’accroissement indécent du budget de l’armée dont les militaires eux-mêmes ne savent que faire, Markus Ritter consoliderait le bloc libéral-national- conservateur formé par les quatre Conseillers-ères fédéraux-ales PLR-UDC. Une hypothèque de longue haleine sur toute tentative de rééquilibrage du Conseil fédéral. Mais une issue conforme au repositionnement politique à droite du parlement, même en l’absence de bouleversement de l’équilibre des forces politiques lors des dernières élections fédérales. Et que dire d’un candidat, à ce stade inconnu, colonel à l’armée, qui esquive – à la mode centriste – les réponses claires sur son positionnement politique. 

Si le rapide brunissement de l’horizon international a de quoi nous inquiéter, l’obscurcissement de l’horizon politique suisse ne doit pas échapper à notre analyse et à notre indispensable mobilisation politique à tous les niveaux du pays.

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