Suite aux diverses polémiques concernant l’impôt auto, nous Jacques Blondin, Grégoire Carasso, Pierre Eckert, Françoise Sapin et Yvan Zweifel ayant fait partie du groupe de travail qui a élaboré le contreprojet accepté en votation populaire, tenons à préciser les choses suivantes.
Le PL 12888 a initialement été déposé par le MCG et proposait une taxation sur l’émission de CO2 au lieu de la puissance. L’émission de CO2 en g/km est assez directement liée à la consommation du véhicule. Il était clair qu’un tel système allait défavoriser les véhicules peu puissants mais consommant beaucoup. Nous avons retenu ce principe, entre autres pour des raisons environnementales.
Nous avons toutefois modifié le barème en le rendant assez progressif. Nous avons également introduit une taxation des véhicules électriques en fonction du poids. Nous ne commenterons pas davantage ici les véhicules électriques, qui ne semblent pas être sujets à polémique actuellement.
Les normes d’émission de CO2 se trouvent actuellement autour 100 g/km pour les véhicules neufs. L’Union européenne place même des malus à l’achat de plusieurs dizaines de milliers d’Euro pour des émissions de plus de 200 g/km.
De façon graphique, le barème sur les véhicules thermiques a la forme suivante :
La valeur de 400 g/km est déjà très extrême et nous avons arrêté le graphique à cet endroit mais la progression se poursuit en ligne droite au-delà de cette valeur. A aucun moment, le département nous a fait remarquer qu’il existait des véhicules qui dépassaient cette valeur.
Pour le développement du contreprojet, nous avons travaillé de concert avec le département. Nous étions bien entendu totalement dépendants de la statistique des véhicules fournie par le département et sommes donc choqués que la faute (si faute il y a) soit rejetée sur les députés.
Nous avons travaillé de façon consciencieuse en demandant au département sur quel type de véhicule les hausses les plus importantes pourraient être constatées. La réponse qui nous a été fournie est la suivante :
Marque | Type | Année 1ère mise en circ. | Puissance en kW | CO2 | Impôt actuel, en fr. | Impôt PL 12888, en fr. |
FORD | S-MAX 2.0i | 2009 | 107 | 194 | 396.5 | 799 |
TOYOTA | RAV4 2.2 D CAT | 2009 | 110 | 189 | 396.5 | 781.5 |
RENAULT | Mégane 2.0 16V | 2008 | 98.5 | 191 | 341.5 | 788.5 |
OPEL | Zafira B18R | 2008 | 103 | 177 | 363.5 | 739.5 |
On voit qu’un doublement est possible, correspondant à des hausses de l’ordre de 400 francs. Et qu’il s’agit de véhicules d’une quinzaine d’années ayant des émissions de CO2 approchant les 200 g/km, soit donc des consommations dépassant les 10 litres aux 100 km. Ces augmentations étaient connues des députés et de la population au moment du vote du contreprojet. La Tribune de Genève avait même mis à disposition un simulateur permettant de visualiser les changements. Il faut aussi mentionner que de nombreux véhicules bénéficient d’une baisse d’impôt sachant que la réforme est fiscalement globalement neutre ; il est donc faux de parler de tromperie et de hausse d’impôts comme le font certains partis ou médias.
Pour la suite, nous proposons tout d’abord de réaliser un état des lieux objectif du nombre de véhicules touchés et de leur type. Il est possible que les exemples rapportés dans la presse ne soient pas représentatifs.
Ensuite, nous sommes prêts à envisager tout aménagement de l’imposition ou de sa perception tout en conservant le principe de l’émission de CO2 comme base, ainsi que la neutralité fiscale. Une solution immédiate serait de donner la possibilité d’échelonner le payement de l’impôt (proposition PLR soutenue par PS, Ve et LC). D’autres adaptations (limitation du barème vers le haut, taxation au
nombre de jours d’utilisation, facilitation du dépôt temporaire des plaques, classification en véhicule vétéran, …) pourront être examinées en commission.
Enfin, nous restons profondément surpris par l’attitude déconcertante du Conseiller d’Etat Pierre Maudet, en charge de ce Département mais manifestement peu au fait de ses dossiers. Nous nous permettons de le renvoyer à ses propos conclusifs tenus le 22 juin 2023 au Grand Conseil :
« Pour toutes ces raisons, le Conseil d’Etat fait sien ce contreprojet. Il estime que nous atteignons ces objectifs de modernité, de simplicité, d’actualité, d’équité et de neutralité. Nous sommes quant à nous convaincus que le souverain suivra la majorité. Nous ne saurions trop vous recommander de soutenir ce contreprojet. Je vous remercie de votre attention. »
Voir en annexe l’intervention complète.
Pour plus d’informations :
- Pierre Eckert, député Les Vert-e-s
- Jacques Blondin, député Le Centre
- Grégoire Carasso, député socialiste
- Françoise Sapin, ex-députée MCG
- Yvan Zweifel, député PLR
Annexe
Extrait : Grand Conseil de Genève – Mémorial
M. Pierre Maudet, conseiller d’Etat : Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons écouté avec beaucoup d’attention les arguments intéressants qui ont été développés de part et d’autre et avons lu avec beaucoup d’intérêt le rapport de M. Carasso. Le Conseil d’Etat, ce soir, doit s’incliner, Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, devant cette frénésie législative quant aux réformes fiscales qui saisit Genève.
Nous avons salué, lors de la session précédente, la réforme de la taxe professionnelle communale – réforme au sens étymologique du terme, c’est-à-dire suppression. Nous saluons ce soir l’évolution, la modernisation de cet impôt auto, dont les limites ont été soulignées par plusieurs d’entre vous, à travers un contreprojet. Et là, toutes mes excuses au représentant du groupe UDC, mais on parle véritablement d’un contreprojet qui est une alternative – et pas un ersatz d’initiative -, qui offre une véritable alternative au souverain, avec la possibilité de se diriger vers un impôt beaucoup plus juste, équilibré et, accessoirement – c’est un argument qui devrait vous convaincre -, très neutre du point de vue de ses effets fiscaux.
Le Conseil d’Etat estime que ce nouveau système fiscal qui sort de commission – et il salue le travail de la majorité – permet d’être en phase avec les objectifs environnementaux que nous poursuivons tous. Il permet également, cela a été dit par certains, d’atteindre un objectif de simplicité, et vous le savez, cette législature doit être placée sous le signe de la simplicité, de la compréhension des mécanismes qui président, dans le cas d’espèce, à une ponction fiscale facile à appréhender pour la citoyenne ou le citoyen.
Il intègre un principe d’actualité, cela a été rappelé sur ces bancs, avec le fait qu’aujourd’hui, il faut se diriger vers une taxation plus faible des véhicules légers et plus lourde des véhicules qui ont une emprise plus importante sur le domaine public, mais également, et c’est important de le souligner – je me tourne vers celles et ceux qui sont encore rétifs à ce contreprojet -, un véritable principe d’équité. Parce qu’avec la possibilité de voter pour ce contreprojet, ce soir, vous octroyez la possibilité aussi de limiter la «surexponentialité» des véhicules puissants et, ainsi, c’est le pari que fait le Conseil d’Etat avec la majorité de la commission, de rapatrier à Genève toute une série de grosses cylindrées, en général immatriculées un peu à l’ouest du lac de Genève… (Commentaires.) …dans cette contrée qui est au bénéfice en tout cas d’un accord fiscal avec la Suisse et que l’on nomme le Valais. (Commentaires.)
Pour toutes ces raisons, le Conseil d’Etat fait sien ce contreprojet. Il estime que nous atteignons ces objectifs de modernité, de simplicité, d’actualité, d’équité et de neutralité. Nous sommes quant à nous convaincus que le souverain suivra la majorité. Nous ne saurions trop vous recommander de soutenir ce contreprojet. Je vous remercie de votre attention.