A 59 voix contre 33 et 1 abstention, la majorité de droite du Grand Conseil vient de voter une loi qui signe le grand retour de la pratique prédatrice des congés-ventes à Genève. Le PS et les Vert-e-s dénoncent une atteinte grave à la protection des locataires et appellent la population à se mobiliser pour y faire barrage dans les urnes.
La pratique du congé-vente consiste à résilier le bail d’un-e locataire afin de pouvoir vendre le logement qu’il ou elle occupe. Généralisée, elle permet de vendre «à la découpe» les appartements d’un immeuble locatif, en réalisant une plus-value spéculative, tout en démantelant le parc locatif à loyers modérés.
Après les ravages causés par cette pratique au début des années 80, les milieux de défense des locataires, soutenus par la population dans les urnes, étaient parvenus à inscrire son interdiction dans la loi. Cette limitation de leur possibilité de s’enrichir est insupportable pour les milieux immobiliers qui ont tenté déjà par deux fois de la supprimer (Loi 8660 refusée en votation population en février 2005 et Loi 11408 refusée en votation populaire en juin 2016). Voici donc la troisième tentative avec le vote ce jour, au Grand Conseil, du projet de loi 13025 du PLR.
Les partisan-es issu-es des milieux immobiliers de cette loi prétendent qu’elle permettra aux locataires de devenir propriétaires de leur logement. Il n’en est évidemment rien. C’est le propriétaire seul qui décide de vendre, lorsque l’opération lui permettra d’évincer les locataires payant des loyers modérés et lui garantira un bénéfice spéculatif.
Ceci est d’autant plus vrai que l’écrasante majorité des locataires ne dispose pas des moyens financiers permettant d’accéder à la propriété. Comme l’ont rappelé Socialistes et Vert-e-s lors des débats, moins de 15% de la population a aujourd’hui les revenus et les moyens de devenir propriétaire à Genève1.
Loin d’être favorable aux locataires, cette loi fait peser sur elles et eux une menace grave et inacceptable: celle de se faire mettre dehors lorsqu’ils et elles n’ont pas les moyens d’acheter le logement qu’ils et elles habitent. Rationalité économique oblige, seul-es les locataires disposant des moyens financiers suffisants pour acheter à terme seront sélectionné-es par les bailleurs privés lors de l’attribution des baux.
C’est aussi la promesse du démantèlement progressif du parc locatif à loyer modéré au profit de la propriété par étage (PPE). De plus, rien n’empêche l’acquéreur de remettre après les 5 ans l’appartement en location; le loyer sera alors massivement plus élevé puisque fondé sur le prix de vente de l’appartement individualisé. C’est ainsi un mécanisme de spirale à la hausse de l’ensemble des loyers du marché genevois.
Cette loi bloquera par ailleurs les projets de rénovation énergétique des bâtiments. En effet, en créant une mixité entre PPE et logements locatifs, la prise de décision collective et la prise en charge des frais pour la rénovation du bâtiment sont plus difficiles. La sortie des énergies fossiles et la transition énergétique sont ainsi eux aussi mis à mal par cette loi.
Une nouvelle fois, les milieux immobiliers attaquent donc la principale loi genevoise de protection des locataires, tant toute limitation de leurs profits leur est insupportable. Une nouvelle fois, ces mêmes milieux tentent de passer en force à l’encontre de la volonté populaire via leurs représentant-es bourgeois-es au Grand Conseil. Une nouvelle fois, ils nous trouveront donc sur leur chemin pour déjouer cette attaque frontale contre les locataires et défendre le droit au logement pour toutes et tous.
Le PS et les Vert-e-s combattront avec force cette loi inique dans les urnes et appellent l’ensemble des forces progressistes à s’unir derrière le référendum que ne manquera pas de lancer l’Asloca.
Pour plus d’informations :
- Caroline Renold, commissaire socialiste au logement et auteure du premier rapport de minorité
- Matthieu Jotterand, chef du groupe socialiste
- Thomas Wenger, président du PS genevois